## L’exemple du monde Arabe Pour quiconque connaît l’âge d’or de la science dans le monde Arabe, qui s’étend à peu près du VIIIe au XIIIe siècle de notre ère, la disparité entre les réalisations intellectuelles du Moyen-Orient d’hier et d’aujourd’hui est vraiment stupéfiante. Quand on sait que la science arabe était la plus avancée au monde jusqu’au XIIIe siècle, Les chiffres de notre époque sont terribles : - Les pays musulmans comptent neuf scientifiques, ingénieurs et techniciens pour mille habitants, contre une moyenne mondiale de quarante-et-un. - Il y a environ 1,6 milliard de musulmans dans le monde, mais seuls deux scientifiques de pays musulmans ont remporté le prix Nobel de science. - Quarante-six pays musulmans réunis ne contribuent qu’à 1% de la littérature scientifique mondiale - Autant que l’Espagne. - Entre 1980 et 2000, la Corée a déposé 16 328 brevets, tandis que neuf pays arabes, dont l’Égypte, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, n’en ont accordé au total que 370, dont beaucoup ont été déposés par des étrangers. Il est courant de supposer que la révolution scientifique et le progrès de la technologie étaient inévitables mais en fait, l’Occident est la seule réussite durable parmi de nombreuses civilisations. Comme les musulmans, les anciennes civilisations chinoises et indiennes, qui étaient toutes deux à une époque beaucoup plus avancées que l’Occident, ont tout simplement arrêtés à un moment donné. Les génies de cette époque sont al-Khwarizmi pour les mathématiques, al-Razi ou Ibn-Sina pour la médecine, il y a aussi al-Farabi qui a fait des contributions très importantes en philosophie, cosmologie, musique, mathématique… al-Biruni a écrit 146 traités totalisant 13 000 pages dans pratiquement tous les domaines scientifiques. Les califats Omeyyade (de 661 à 750) et Abbasside (de 751 à 1258) ont été les périodes les plus prolifiques sur le plan intellectuel. Le monde islamique est passé d’un univers de tribu à un véritable empire en permettant une unification de la langue et des hommes qui pouvaient ainsi voyager et échanger des idées. L’une des découvertes les plus importantes des musulmans a été le papier, qui a probablement été inventé en Chine. L’effet du papier sur la culture de la société arabe a été énorme : il rendait la reproduction de livres bon marché et il encourageait l’érudition, la correspondance, la poésie, la tenue de registres et la banque. Mais la raison la plus importante pour laquelle la science arabe a prospéré était l’absorption et l’assimilation de l’héritage grec grâce à la traduction. Cela leur a servi de base à toutes les recherches futures. La fin de cette période commence en 1258 quand le peu qui restait de l’État abbasside fut balayé par l’invasion mongole. Mais l’un des éléments clés est la montée en puissance de l’école Ash’Arisme qui s'est opposée à toute étude scientifique qui n’aidait pas directement à la réglementation religieuse de la vie privée et publique. Alors que les précédentes écoles pensaient que Le Coran avait été créé par Dieu pour l’homme et devait donc être interprété par la raison, les Ash’arites croyaient que le Coran était l’égal de Dieu et devait donc être traité littéralement. Au cœur de la métaphysique Ash’ari se trouve l’idée "*d’occasionnalisme*”, une doctrine qui nie la causalité naturelle. En termes simples, cela suggère que la nécessité naturelle ne peut pas exister parce que la volonté de Dieu est complètement libre. Les Ash’arites croyaient que Dieu est la seule cause, de sorte que le monde est une série d’événements physiques discrets, chacun voulu par Dieu. Une des voix les plus influentes de cette école était Abu Hamid al-Ghazali qui a fortement dénoncé les philosophes et la philosophie. Il pensait qu’en se laissant guider par la raison, on se laissait guider par le questionnement, la découverte et l’innovation ce qui rendait forcément moins pieux, car on se mettait alors à questionner le Coran. Il disait d’ailleurs : “*Rien dans la nature ne peut agir spontanément et en dehors de Dieu*”. “*Parce que les disciplines rationnelles n’avaient pas été institutionnalisées dans l’islam classique, l’adoption de l' héritage grec n’a eu aucun effet durable sur la civilisation islamique*” - Bassam Tibi [Why the Arabic World Turned Away from Science](https://www.thenewatlantis.com/publications/why-the-arabic-world-turned-away-from-science)