*Ce guide a été écrit notamment grâce à la lecture du livre [Hard Things : Entreprendre dans l'incertitude](https://amzn.to/3RNVe9I).* ## Le plus difficile. La chose la plus compliquée à gérer pour un dirigeant, c’est sa propre psychologie. La seule chose qui vous apprend à diriger une entreprise, c’est diriger une entreprise. Aucune formation de manager ne peut vous y préparer. Vous allez faire face en permanence à de nouvelles choses que vous ne connaissez pas et pour lesquelles vous n’avez pas les compétences. Et même si vous savez ce que vous faites, les choses iront mal, vous pouvez en être sûr. Avec ce stress quasi permanent, le dirigeant fait généralement une de ses deux erreurs : - Il prend les choses de manière trop personnelle. - Il ne prend pas les choses de manière assez personnelle. Dans le premier scénario, si la CEO est axée sur les causes extérieures, elle finira par terroriser l’équipe au point que personne ne voudra bosser pour l’entreprise. Si la CEO est axée vers les causes intérieures, elle va se rendre malade et finira par avoir du mal à se rendre au travail. Dans le deuxième scénario, la CEO considère qu’aucun des problèmes n’est grave et ne nécessite une attention particulière. Ceci peut frustrer les employés et les décourager sur le long terme. Idéalement, **la CEO sera toujours dans l’urgence sans virer à la folie**. Elle va agir de façon forte et décisive sans ressentir de culpabilité. Si elle peut arriver à séparer l’importance du problème de ce que cela lui fait ressentir, elle évitera en plus de diaboliser ses employés ou elle-même. Dernier point : si vous n’aimez pas choisir entre un choix horrible et un autre choix apocalyptique, ne devenez pas CEO, car chaque entreprise passe par des moments où elle est à deux doigts de fermer. ## A quoi se rattacher ? Dans les moments difficiles, il faut constamment garder trois choses à l’esprit : - **Si vous jouez assez longtemps, vous pourriez avoir de la chance**. Demain ne ressemble pas à aujourd'hui. Si vous survivez jusqu’à demain, une réponse que vous n’aviez pas prévue vous arrivera peut-être. - **Ne prenez pas les choses personnellement**. Vous avez pris des décisions, certaines bonnes, certaines mauvaises, mais vous saviez qu’être CEO n’était pas facile avant de commencer. Tous les CEO font des milliers d’erreurs. Vous évaluer et vous donner une mauvaise note ne vas pas vous aider. - **Rappelez-vous que c’est dans ce genre de moments que l’on peut voir la différence entre les femmes et les fillettes**. C’est ici que se situe le challenge. Si vous ne vouliez pas cela, vous n’auriez pas dû créer une entreprise. Et surtout, n’attendez pas qu’on vous comprenne. Une CEO rencontre parfois tellement de problèmes qu’elle se met à se poser des tonnes de questions et à ressasser les choses. **Que faire ? En fait, vous devez juste faire votre boulot de CEO car, voyez-vous, tout le monde s’en fout de vos problèmes**. **Quand les choses vont mal dans votre entreprise, tout le monde s’en fout : vous êtes seul.** Et ils ont raison de s’en foutre. Avoir des bonnes excuses pour échouer n’économisera pas un seul euro à vos actionnaires, ne sauvera pas le travail de vos employés, et ne vous amènera aucun nouveau client. Et ces excuses ne vous feront pas vous sentir mieux quand vous vous déclarerez en faillite. Ne passez pas une seconde de votre temps sur ce que vous auriez dû faire et concentrez tout votre temps sur ce que vous devriez faire parce qu’à la fin, tout le monde s’en fout de toute façon. ## Le CEO doit voir les choses telles qu’elles sont. Il faut arrêté d’être trop positif. Quand Ben Horowitz a débuté, il prenait chaque échec comme une claque : en cas de perte d’un client, de dépassement d’une date ou de livraison d’un produit qui ne convenait pas… Il pensait que cela empirerait les choses de transférer ce poids sur ses employés. Il s’était donc mis comme devoir de toujours avoir une vision positive pour rallier ses troupes à la victoire. Et il avait totalement tort. En fait, **ce qu’il faut faire, c’est donner le problème à la personne qui pourra non seulement le résoudre, mais sera aussi personnellement motivée pour le faire**. Il y a trois principales raisons de dire les choses telles qu’elles sont : - **La confiance** : sans confiance, pas de communication. Plus spécifiquement, dans chaque interaction humaine, le niveau de communication requis est inversement proportionnel au niveau de confiance. Si je vous fais complètement confiance, je n’ai pas besoin d’explication ou de communication, car je sais que peu importe ce que vous faites, c’est dans mon intérêt. - **Plus il y a de cerveaux qui travaillent sur vos problèmes, plus vous avez des chances de les résoudre**. Ce serait donc un gaspillage total que de ne pas mettre vos équipes sur les problèmes les plus importants que vous avez. - **Les mauvaises nouvelles voyagent plus vite que les bonnes**. Si vous interviewez des personnes qui ont travaillé dans des entreprises qui ont échouées, vous vous rendrez vite compte que beaucoup d’employés savaient ce qui allaient se passer. Pourquoi n’ont ils rien dit ? La réponse est souvent que la culture de l’entreprise décourageait la diffusion de mauvaises nouvelles, ce qui rendait cette connaissance dormante jusqu’à ce qu’il soit trop tard. Vous devez encourager le partage des mauvaises nouvelles. ## Faites de vous un CEO. Votre tâche la plus importante est d’évaluer les performances des autres et leur faire un retour sur le sujet. L’idée de base est de commencer par complimenter les gens sur ce qui marche, puis leur expliquer ce qui ne va pas et leur rappeler à quel point vous appréciez leurs points forts. Voici les clés pour être efficace dans cet exercice : - **Soyez authentique** : il est très important que vous croyiez au retour que vous donnez. - **Ayez le bon objectif en tête** : vous donnez un retour aux gens pour qu’ils réussissent, pas pour qu’ils échouent. Faites le ressentir. - **Pas devant les autres** : ne jamais embarrasser quelqu’un devant les autres. Privilégiez les rencontres en têtes à têtes. - **Soyez direct sans être méchant** : si quelqu’un fait une mauvaise présentation, ne dites pas “*pas mal, mais on pourrait améliorer la conclusion*”, dites plutôt : “*je n’ai pas réussi à suivre, je n’ai pas compris ça et ça pour telle ou telle raison...*”. - Pour être un bon CEO, **vous devez vous préparer à faire des choses qui font que les gens vont être mécontents** au début et vous dire qu’ils ne vous apprécieront, éventuellement, que sur la distance. ## CEO en temps de paix / CEO en temps de guerre. **En temps de paix**, votre entreprise a un large avantage sur la compétition et votre marché grossit. L’entreprise peut se concentrer sur la captation de plus grandes parts de marché et renforcer ses points forts. Une mission classique de temps de paix est celle que s’est fixée Google de rendre l’internet plus rapide. Sa position est tellement dominante dans la recherche qu’ils ont pu se dire que tout ce qui facilitait l’accès à internet augmenterait leurs revenus, car plus de gens feront des recherches. En tant que leader du marché, ils ont pu se concentrer sur l’extension du marché plutôt que de s’inquiéter de leurs concurrents. **En temps de guerre**, l’entreprise fait face à une menace existentielle imminente, qu’elle vienne de la concurrence, des conditions économiques globales, de problèmes juridiques... Une mission classique de temps de guerre était celle d’Andy Grove (Intel) qui devait sortir du marché de la mémoire RAM à cause de la puissance et des coûts des fabricants japonais. Cette mission qui aurait pu envoyer la société à la faillite a permis de la sortir d’un métier qui employait 80% de ses équipes. Ces deux types de périodes nécessitent des styles de management complètement différents : - **En temps de paix**, les leaders doivent maximiser et élargir les opportunités qu’ils sont en train d’exploiter. Les CEO en temps de paix encouragent la créativité sur une gamme importante d’objectifs possibles. - **En temps de guerre**, l’entreprise n’a plus qu’une balle à tirer et doit, à tout prix, toucher sa cible. La survie de la compagnie dépend de l’adhésion stricte et de l’alignement à la mission de l’entreprise. Les différences : - En temps de paix, le CEO suit le protocole pour arriver à la victoire / En temps de guerre, le CEO viole le protocole pour arriver à la victoire. - En temps de paix, le CEO se concentre sur la vision d’ensemble et laisse les employés gérer les détails / En temps de guerre, le CEO s’occupe de la plus petite chose si cela interfère avec la survie de la société. - En temps de paix, le CEO essaye de définir une culture d’entreprise / En temps de guerre, le CEO laisse la guerre définir cette culture. - En temps de paix, le CEO voit les concurrents comme d’autres bateaux de guerre naviguant sur un vaste océan où ils ne se croisent que très rarement / En temps de guerre, le CEO voit la concurrence comme des gens essayant de s’introduire dans leurs maisons pour kidnapper leurs enfants. - En temps de paix, le CEO est tolérant s'il y des écarts par rapport au plan prévu / En temps de guerre, le CEO est complètement intolérant. ## Pour finir. Il n’y a pas de CEO parfait. Des styles complètement différents peuvent obtenir de grands résultats. Une des plus grosses erreurs est de croire qu’un CEO doit être égoïste, impitoyable et insensible. Les vrais CEO créent un environnement où les employés ressentent que le CEO fait passer leurs besoins avant les siens. La plupart des gens définissent le leadership de la même façon que le juge Potter Stewart avait défini la pornographie : “*Je le sais quand je le vois*” mais trois traits ressortent quand même souvent : - La capacité d’articuler une vision. - Le bon type d’ambition. - La capacité à atteindre la vision qu’il a fixée. Et comme le disait Steve Jobs, ne pensez pas qu'il y a d'un côté, ceux qui font, et de l'autre ceux qui pensent, [ceux qui créent vraiment les choses qui transforment cette industrie sont à la fois des penseurs et des acteurs réunis en une seule personne](https://x.com/readswithravi/status/1801834133179576549).